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L'ÉTAT DES RECHERCHES - MAIS OÙ SE SITUE DONC GERGOVIE ?
Un exemple incontesté, le cas de Besançon. |
CORRESPONDANCE DES TEXTES ET DES LIEUX
Pour
tenter de justifier l'absence de corrélation entre le texte de César et
le site de Merdogne-Gergovie, certains ont soutenu que César n'aurait
pas été exact dans ses descriptions, arguant du fait que son livre
avait été écrit pour des raisons politiques, et non descriptives. C'est
oublier que César, en tant que tacticien, décrit les lieux en fonction
de leurs particularités militaires. Si ses connaissances géographiques
lui permettent difficilement d'indiquer les distances entre les lieux
autrement que par des journées de marche, ses descriptions succinctes
des sites apparaissent comme particulièrement efficaces. L'exemple
d'une ville admise par tous les historiens, le cas de
Vesontio-Besançon, peut nous éclairer sur la justesse des descriptions
de César.
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Plan de la ville de Besançon, Samson Bruley (1615). |
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Si
Gergovie, Alésia ou Uxellodunum posent problème, la ville de Besançon
est reconnue par tous comme étant bien la Vesontio de César. Voici la
description qu'il en fait :
« Sa
position naturelle la rendait si forte qu'elle offrait de grandes
facilités pour faire durer les hostilités : le Doubs entoure presque la
ville entière d'un cercle qu'on dirait tracé au compas; l'espace que la
rivière laisse libre ne mesure pas plus de 1600 pieds, et une montagne
élevée le ferme si complètement que la rivière en baigne la base des
deux côtés. »
(B. G., LIVRE I, CHAP. 38).
On pourrait imaginer que le peintre ait été influencé par la lecture de la Guerre des Gaules. Mais voici une photo moins influençable : |
Ci-dessous,
photographie de la ville actuelle de Besançon. La correspondance du
site avec la description de César est frappante. Si le cercle formé par
la rivière du Doubs n'est pas parfait, on voit nettement la « montagne
» (à gauche au fond de la ville) dont « la rivière baigne la base des deux côtés ». Les Gaulois, selon César, avaient fortifié cet endroit… où se situe la forteresse de JOUX.
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Reste à savoir si « l'espace que la rivière laisse libre ne mesure pas plus de 1600 pieds » comme l'écrit César.
Le pied romain à l'époque de César mesure 29,64 cm.
Donc, une conversion en mètres nous donne : 0,2964 m X 1600, soit 474,24 m. |
Sur cette photo satellite de l'actuelle Besançon, César s'est trompé de 72 centimètres…
Voilà de quoi se faire une idée des imprécisions de César. |
Que doit-on retrouver sur le site de Gergovie, selon le texte de César ? |
LIVRE VII, CHAP. 36.
«
Ayant reconnu la place, qui était sur une montagne fort haute et
d’accès partout difficile, il désespéra de l’enlever de force. » |
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Le terme altissimo monte utilisé par César indique que l’oppidum de Gergovie doit être effectivement une véritable montagne, haute et de surcroît protégée par la nature, avec des accès restreints. |
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LIVRE VII, CHAP. 36.
«
De son côté, Vercingétorix avait campé près de la ville, sur la
hauteur, et il avait disposé autour de lui les forces de chaque cité,
en les séparant que par un léger intervalle : tous les sommets de
cette chaîne que la vue découvrait était occupée par ses troupes, en
sorte qu’elles offraient un spectacle terrifiant. » |
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Le site doit donc comporter « une chaîne de collines » comportant évidemment plusieurs sommets. Le terme « iugi collibus » précise que cette chaîne de collines prend en outre la forme d’un joug (attelage de bêtes de trait - ΩΩ).
L’importance des forces gauloises n’est pas précisée, mais nous pouvons
déduire de celle des Romains (6 légions plus bientôt 10000 fantassins
éduens plus de la cavalerie, c’est-à-dire au minimum 40000 hommes) que
les forces gauloises, auxquelles on doit ajouter femmes et enfants,
sont conséquentes : l’ensemble montagneux doit être très grand, ce qui doit ajouter au « spectacle terrifiant ». |
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LIVRE VII, CHAP. 36.
«
Il y avait une colline, alignée sur l'oppidum, naissant des racines de
celui-ci, bien fortifiée et isolée de toutes parts : si nous
l’occupions, nous priverions l’ennemi d’une grande partie de son eau et
il ne fourragerait plus librement. » |
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Le site doit donc comporter une colline isolée située juste au pied de l’oppidum.
« alignée sur l'oppidum », en latin e regione oppidi,
nous indique que, vu de l’emplacement du grand camp des légions de
César, l’ensemble grand camp-colline-oppidum doit être aligné, formant e regione une ligne droite.
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LIVRE VII, CHAP. 36.
«
Pourtant, César, étant sorti de son camp au milieu du silence de la
nuit, bouscula les défenseurs avant que l’on eût pu les secourir de la
place et, maître de la position, y installa deux légions ; il
relia le petit camp au grand camp par un double fossé de 12 pieds de
large… » |
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C’est la première mention par César du grand camp qui doit être vaste
(6 légions) et nécessairement en plaine. Dion Cassius, dans son Histoire romaine,
précise, en outre, que ce camp est «sous les yeux des barbares, car ils
occupent aussi des hauteurs à droite» (Dion Cassius, H. R. 26). En
l'absence de César, son légat Fabius note qu'il a du mal à se défendre,
«en raison de la grandeur du camp» (CHAP. 41).
Sur la colline isolée se situe donc un « petit » camp romain fortifié
pouvant accueillir au minimum deux légions (10000 hommes). Dion Cassius
(Dion, H.R., 40, 36, 4) précise que les travaux évoqués par César (cf.
CHAP. 44) comportent l'établissement d'un camp «en dur», donc un
rempart et des infrastructures en pierre.
Les traces de deux fossés de 3,60 mètres de largeur et… de plusieurs
centaines de mètres de longueur au minimum doivent se situer entre le
grand et le petit camp.
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LIVRE VII, CHAP. 44.
«
Étant venu au petit camp pour inspecter les ouvrages, il remarqua
qu’une colline qui était dans les lignes de l’ennemi était dégarnie de
troupes, alors que les jours précédents elles y étaient si denses que
le sol s’en voyait à peine. » |
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Il existerait donc sur place une autre colline.
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LIVRE VII, CHAP. 44.
«
Tous font la même déclaration : comme César l’avait déjà appris
par ses éclaireurs, le revers de cette colline était presque plat, mais
boisé et étroit dans la partie où l’on accédait à l’autre côté de la
ville ; l’ennemi craignait beaucoup pour cet endroit et il sentait
bien que, les Romains occupant déjà une colline, s’ils perdaient
l’autre, ils seraient presque enveloppés et ne pourraient ni sortir ni
fourrager. » |
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Cette deuxième colline doit comporter un accès presque plat et étroit vers l’oppidum. |
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LIVRE VII, CHAP. 45.
« Après quoi, il donne le signal de l’assaut et lance en même temps, sur la droite, par une autre montée, les Éduens. » |
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À droite de l’attaque principale, il y a une autre montée. |
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LIVRE VII, CHAP. 46.
«
La distance entre le mur de la ville et la plaine, depuis l’endroit où
commençait la montée, était en ligne droite sans aucun détour, de 1200
pas. » |
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De la plaine, par les deux fossés
vers le petit camp et, de là, vers l’oppidum, en droite ligne,
l’ascension représente 1200 double pas romains, soit environ 1,7 km. |
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LIVRE VII, CHAP. 46.
«
Environ à mi-hauteur, les Gaulois avaient construit un mur de grandes
pierres, haut de six pieds, qui suivait le flanc de la colline aussi
régulièrement que le permettait la nature du terrain, et était destiné
à ralentir notre assaut ; toute la zone inférieure avait été
laissée vide tandis que la partie de la colline comprise entre ce mur
et le rempart de la ville était remplie de campements très serrés. » |
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Un rempart de grandes pierres doit se situer à mi-hauteur d’une troisième colline. L’existence de cette troisième colline
se déduit du fait qu’une attaque de diversion est menée en direction de
la deuxième colline. César ne peut donc attaquer avec l’essentiel de
ses forces la colline vers laquelle, par ruse, il a attiré l’essentiel
des forces gauloises. Cette troisième colline ne peut se situer en outre qu’ à gauche de l’axe reliant grand camp-petit camp-oppidum
puisque la colline du petit camp touche le pied de l’oppidum et qu’il
ne peut donc y avoir de colline entre les deux. De plus, les Éduens
ayant été envoyés sur la droite par une autre montée, la troisième
colline ne peut se situer qu’à gauche. |
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LIVRE VII, CHAP. 47.
«
Lorsque César comprend que ses soldats, partis à l’assaut à partir du
petit camp, ne pourront l’emporter, il les fait rappeler. Mais ils
n’entendent pas, car ils sont situés « au-delà d’un ravin assez large. » |
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Entre la première colline, sur laquelle se situe le petit camp de César, et la troisième colline, il y a un vaste ravin.Il y a là confirmation que l’ensemble des diversions s’est faite sur la droite des Romains. |
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LIVRE VII, CHAP. 50.
«…
quand soudain on vit paraître sur notre flanc droit les Éduens, que
César avait envoyé par une autre montée, à droite, pour faire diversion. » |
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De plus, un espace relativement plat dans les défenses gauloises relie
nécessairement la montée à droite des Éduens et les forces romaines qui
sont arrivées au pied du rempart de l’oppidum. |
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Résumé de la description de César : le portrait-robot de Gergovie. |
Gergovie doit être située sur une montagne dominant la plaine et être d’accès difficile . Une chaîne de collines en forme de joug doit se situer à droite de l'observateur placé au grand camp romain de la plaine . Par de faibles dénivellations, en suivant les croupes de ce iugum, on peut accéder à l'oppidum par un passage étroit, du côté opposé aux Romains .
Une colline 1, rattachée par sa base à l'oppidum, est située sur un axe reliant l'observateur romain à l'oppidum . Elle est escarpée de toute part . Son sommet est assez vaste pour qu'on ait pu y établir deux légions .
Des traces de structures en pierre devraient s’y trouver, puisque le
petit camp, conçu dès l'origine comme une base d'assaut, est un camp de
pierre .
Une colline 2 présente les mêmes avantages tactiques. Elle est bien visible de la colline 1 . Elle se trouve dans le même ensemble que le iugum,
donc à droite pour l'observateur romain. Un espace relativement plat
doit permettre la jonction entre la colline 2 et la colline 3 .
Enfin l’attaque principale romaine, partant du petit camp établi sur la
colline 1, doit trouver sur son passage une colline 3, au delà d’un
vaste ravin au flanc même de l’oppidum, à gauche de l'axe reliant les camps à l'oppidum .
Des murs entouraient l’oppidum . Un autre rempart en pierres de grande taille protégeait à mi-hauteur la colline 3 .
Les traces de deux fossés de 3,60 m sur plusieurs centaines de mètres
de longueur au minimum doivent se situer entre le grand camp et le
petit camp . Le grand camp doit être vaste et dans la plaine .
PORTRAIT ROBOT :
PORTRAIT ROBOT RÉALISÉ PAR MICHEL RENAUD ET YANNICK ZABALLOS
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Portrait
robot de Gergovie par Andrea Palladio, grand architecte de la
Renaissance, in Les Quatre Livres de l'Architecture, 1570. Palladio,
qui n'est jamais venu en Auvergne, a très nettement compris dès
le XVIe siècle la disposition décrite par César : alignement du grand
camp (au premier plan), du petit camp et de l'oppidum et collines
formant un joug sur la droite. La colline sur laquelle est construit le
petit camp est bien « isolée de toutes parts» et sert de base à une
attaque frontale. Par contre, il semble imaginer la diversion des
muletiers sur la gauche de l'oppidum. On croirait néanmoins reconnaître
les Côtes de Clermont !
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Gergovie-Merdogne face au texte de César. |
CORRESPONDANCE DU TEXTE ET DU SITE :
Si l'oppidum de Merdogne peut apparaître comme une montagne , il possède une superficie au moins DEUX FOIS PLUS PETITE (70 ha) que l'oppidum des Côtes de Clermont (160 ha).
AUCUNE CHAÎNE DE COLLINES À DROITE
n'apparaît du grand camp. S'il existe l'équivalent d'une chaîne, elle
est à gauche, ce qui est gênant, et ne ressemble pas à un joug . César s'est donc trompé ou regardait par les yeux des Gaulois.
La colline reconnue comme étant celle sur laquelle César fit construire le petit camp n'est EN AUCUN CAS « ESCARPÉE DE TOUTES PARTS » . Elle n'est pas non plus « E REGIONE», c'est-à-dire dans l'axe du grand camp avec l'oppidum . Plus grave, AUCUNE TRACE DE STRUCTURES DE PIERRES n'est décelable en cet endroit . En outre, la surface de son sommet n'est que de cinq hectares, presque TROIS FOIS MOINS
que celle du sommet de Chanturgue aux Côtes de Clermont. Cinq hectares
permettent difficilement le cantonnement de deux légions et INTERDISENT le rassemblement de quatre à cinq légions au moment de l'attaque ! L'absence de structures de pierres est INEXPLICABLE.
Sur l'oppidum même, il existe des traces de remparts antérieurs et de remparts postérieurs mais AUCUNE TRACE DE REMPART À L'ÉPOQUE DE LA GUERRE DES GAULES !!!
Cela perturbe quelque peu les archéologues officiels : la Gergovie de
Vercingétorix, capitale des Arvernes, aurait été un oppidum sans murs
de défense.
Il n'y a PAS DE TROISIÈME COLLINE visible de la première colline et pourvue d'un rempart à mi-hauteur et PAS DE VASTE RAVIN .
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Voici
les emplacements de l'oppidum, du grand camp et du petit camp selon la
version officielle. La version de la bataille présentée ici est l'une
des 25 imaginées pour faire cadrer le site de Gergovie-Merdogne avec le
texte de César !
Illustration issue de l'ouvrage GERGOVIE, Défaite de César sur les Côtes de Clermont, © Les éditions Fragile.
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En dehors des incohérences avec le texte de César, plusieurs points supplémentaires sont à relever :
1.
Le site officiel de Gergovie-Merdogne se situe à plus à 6 km de la
capitale gallo-romaine, alors que les Côtes de Clermont dominent
directement l'antique cité. Pourquoi une capitale se serait-elle
déplacée de 6 kilomètres ?
2.
Le site de Merdogne se trouve dans un cul-de-sac à la pointe sud de la
vallée de la Limagne alors que les Côtes de Clermont dominent
pleinement la grande vallée.
3.
Un lac, le lac de Sarliève, asséché depuis le XVIIe siècle, occupait
une grande partie de la zone au nord du grand camp, coupant ainsi César
de véritable possibilité de retraite vers le nord. Or, c'est du nord
que César puis les renforts éduens arrivent, ainsi que tous les
ravitaillements. Et c'est au nord qu'il repart après sa défaite.
4.
Toutes les pentes de l'oppidum de Merdogne accusent un très fort
dénivelé. Prosper Mérimée déjà s'étonnait qu'une cavalerie gauloise ait
pu circuler sur ces pentes abruptes… Comment les soldats romains
auraient-ils pu en outre monter à l'assaut de telles pentes ?
5. Il n'y a PAS D'EAU
au sommet de l'oppidum de Merdogne car aucune couche d'argile ne
retient l'eau et aucune source ne filtre à cette altitude. Comment
faire vivre un peuple et de nombreuses armées sur une montagne sans eau
?
6. La falaise
aménagée par l'homme au pied de l'ancien rempart mesure à elle seule
plus de 4 mètres, hauteur à laquelle il faudrait ajouter la hauteur du
rempart, soit un minimum de 6 mètres au total. Comment un centurion
romain, comme l'affirme le texte de César, aurait-il pu monter sur le
rempart, avec l'aide de trois soldats (CHAP. 47) ?
BREF, LE SITE DE GERGOVIE-MERDOGNE NE PEUT PAS ÊTRE GERGOVIE.
Histoire des fouilles sur Merdogne : un vrai poème. |
LES FAITS
Une
première campagne officielle de fouilles en 1765 sur le plateau de
Merdogne se conclut par la découverte de vestiges gallo-romains. En
1862, le commandant Stoffel, capitaine d’artillerie, est désigné par
Napoléon III pour diriger les fouilles afin de découvrir les camps
romains. Militaire et non archéologue, Stoffel est un serviteur zélé
qui va s'efforcer de servir la thèse impériale. Il est d’ailleurs nommé
en septembre de la même année directeur – avec les pleins pouvoirs –
des fouilles d’Alésia, la commission chargée jusqu’alors des recherches
n’ayant pas trouvé de preuves… assez convaincantes. Il sera nommé chef
d’escadron, colonel et aide de camps rattaché à l’empereur.
Que trouve Stoffel ? Des fossés. Uniquement des fossés. Sans aucun
élément de datation. Un fossé formant une sorte de quadrilatère à
l’emplacement supposé du grand camp, un fossé à celui du petit camp. Et
deux fossés semblant relier les deux positions décrétées grand camp et
petit camp…
Entre 1936 et 1939 le Père Gorce, professeur au séminaire de
Clermont-Ferrand, entreprend de vérifier les travaux de Stoffel. Il
ouvre 48 tranchées perpendiculairement au tracé présumé des fossés. Ces
recherches confirment… l’existence de fossés. Les relevés, imprécis,
sont inutilisables.
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Exemple de fossé découvert par Eugène Stoffel à l’emplacement supposé du grand camp.
Indatables, très peu profonds, l’ensemble des fossés constitue l’une
des « preuves » principales de la localisation de
Gergovie sur le plateau de Merdogne. Une section d’un fossé du supposé
petit camp a bien révélé en 1995 et 1996 une amphore et deux pointes de
baliste. Seule l’amphore a pu être datée : Ier siècle av. J.-C.
Mais le Ier siècle a duré 100 ans et deux pointes de baliste non datées
prouvent… la présence possible d’une réserve de munitions, et non
l’existence d’un combat entre plus de 80 000 hommes en 52 av. J.-C. |
De 1934 à 1939, les archéologues O. Brogan et E. Desforges fouillent
non plus les camps supposés mais le plateau même de Merdogne,
s’intéressant au rempart de l’oppidum. Puis, de 1941 à 1949, J.-J. Hatt
et M. Labrousse s’intéressent à l’intérieur de l’enceinte. Quelle sont
leurs conclusions ? S’ils découvrent bien un rempart très antérieur à
la période de la guerre des Gaules… et un autre rempart… postérieur à
la guerre des Gaules, ainsi que de nombreux vestiges de l’époque
gallo-romaine, tous s’interrogent sur l’absence complète
de traces d’occupation et d’habitat durant la période précédant la
guerre des Gaules. L’oppidum où Vercingétorix a vu le jour… semble
désert en 52 av. J.-C.
Dès les années 1950, donc, la thèse de Gergovie-Merdogne, capitale des
Arvernes sans Arvernes, devient d’un point de vue archéologique
insoutenable. Pourtant, les autorités vont systématiquement défendre
cette thèse, allant jusqu’à construire sur l’oppidum un musée sans
objet, puis confiant à la DDE de flécher abondamment le site auprès des
automobilistes.
Revenons à l’archéologie : lors de l'établissement de la « Carte
archéologique de la Gaule » pour le département du Puy-de-Dôme, en
1994, Vincent Guichard, Daniel Leguet, Fernand Malacher et Denis
Tourlonias, concluent de l'étude du matériel récolté sur le plateau que
« l'existence d'une occupation contemporaine des évènements
décrits par César paraît plausible, même si elle demeure à
préciser ». Les dernières fouilles ont confirmé l'existence
de deux remparts séparés dans le temps par une période d'abandon et
d'effondrement; la première structure, construite vers 650 à 580 avant
J.-C. est abandonnée et s'effondre entre 500 et 375 avant J.C. En 2004,
le rempart le plus récent est daté… de -30 (sans grand doute parce que
des restes gallo-romains sont inclus dans ou autour du rempart) :
en jargon archéologique, cela donne une fourchette -60 -15. Mais en
2006, une nouvelle datation affirme -52 parce qu’une portion du mur est
mal construite et qu’elle doit donc correspondre à un extrait de César
où il indique que les Gaulois étaient en train de renforcer un mur. Ce
n’est donc plus l’archéologie qui confirme les hypothèses, mais les
hypothèses qui datent les faits… Puisqu’il doit s’agir de Gergovie,
datons nos fouilles de -52…
Ce mur ne peut être celui décrit par César car, de plus, ce second
rempart devait avoisiner les 6 mètres de hauteur en prenant en compte
la falaise du plateau de Merdogne. Il n’aurait donc pas pu permettre au
centurion Lucius Fabius de le franchir, aidé seulement pas trois
soldats qu'il avait tiré à lui une fois parvenu au sommet (B.G. LIVRE
VII, chap. 67); pas plus que des femmes n’ont pu en descendre, se
laissant glisser après s'être suspendues aux mains de leurs compagnes
restées au sommet (B.G. LIVRE VII, chap. 67). Ce mur n'est pas le mur
décrit par César.
En résumé, l’oppidum de Merdogne n’était pas occupé à l’époque de la
Guerre des Gaules et n’est pas Gergovie. Mais les archéologues désignés
par les autorités continuent à défendre cette thèse et à refuser de
fouiller les Côtes de Clermont.
Contrairement au plateau de Merdogne, cependant, la ferme de Gergovie,
la fameuse « villa Gergoia » à l’origine de l’erreur de
localisation, située en plaine, non loin de là sur la route qui mène au
vrai oppidum de Gergovie, a livré un abondant mobilier, du néolithique
au gallo-Romain, par de simples ramassages de surface et sondages
: collection de mobilier appartenant aux propriétaires et comprenant de
la céramique, cinq fibules et 48 monnaies, provenant de ramassages de
surface autour des bâtiments. La céramique comprend quelques tessons du
Ier siècle av. J.-C. De nouvelles prospections systématiques ont mis en
évidence une occupation depuis la période néolithique dans tout le
secteur compris entre le ravin de Mardoux au nord et le ravin de Vendat
au sud… L’occupation du second âge du fer est étendue.
Cette ferme est à l’origine du malentendu.
Histoire des fouilles aux Côtes de Clermont :
un homme seul et une carrière de basalte. |
L'archéologie
aux Côtes est loin d'être aussi développée qu'à Merdogne. De plus, les
conditions de conservation des objets archéologiques y sont moins
bonnes, car des objets ne peuvent s’y enfouir en raison d'une couche de
terre beaucoup plus fine. Le matériel métallique en particulier
apparaît bien moins présent.
Au début des année 1930 Maurice Busset réalise quelques petits
sondages. Mais il n'est pas archéologue. Il manque de méthode et de
connaissances pour dater et interpréter correctement ses découvertes.
L'archéologie ne prend réellement son essor aux Côtes qu'à partir des
années 1950 avec Paul Eychard, qui met au jour un temple, probablement
d'époque augustéenne mais plusieurs fois remanié, jusqu'à sa
destruction vers le IIIe siècle ap. J.C., ainsi que plusieurs autres
monuments à proximité du lieu de culte. Dans une zone plus basse, du
côté est du plateau, ses fouilles font apparaître des rues et des
maisons gallo-romaines. Sous ces structures bâties, des lambeaux de
couches archéologiques livrent du matériel que Paul Eychart date en
partie de la Tène finale (sous-période du système de datation de la
civilisation celtique, correspondant à l’époque -120 à -30 av. J.-C.).
En prospection, Paul Eychart a reconnu des traces d’habitat nombreuses
essentiellement sur le flanc oriental de l’oppidum. Le niveau juste
antérieur à la Guerre des Gaules serait selon lui recouvert d’une
couche d’incendie visible en stratigraphie sur plusieurs centaines de
mètres. Cela a été noté dans la Carte Archéologique du Puy de Dôme…
mais jamais étudié.
Non seulement les autorités officielles, en dehors de la commune de
Clermont, n’ont pas aidé Paul Eychart, mais elles ont permis, de 1957 à
2003, l’exploitation d’une carrière de basalte qui a totalement
défiguré et avalé la partie sud-ouest de l’oppidum.
Par ailleurs, Paul Eychart s’est intéressé à démontrer l’existence d’un
camp romain sur le plateau de Chanturgue. Sur ce plateau, il a pu
reconnaître un rempart de 380 mètres de long et de 3 à 4 mètres
d’épaisseur face à l’oppidum, un système d’entrée en clavicule protégé
par un tutulus, système caractéristique des fortifications romaines. À
l’intérieur du camp, il a reconnu la via principalis, des cantonnements à l’est, un praetorium, un castellum, un corps de garde et des bases de tir de machines de guerre (scorpions ou balistes).
Vestiges du camp romain de Massada (73-74 ap. J.-C.).
Il est évident que dans le désert de Judée les traces d’un camp après
2000 ans sont plus visibles que sur un plateau du Massif central
! Pourtant, dans les broussailles, le camp romain de Chanturgue
constitue un très rare exemple en Europe de camp romain encore visible.
Les autorités archéologiques ont jusqu’à ce jour toujours refusé de
fouiller le plateau et d’apporter ainsi une réponse claire.
Paul Eychart attendait des autorités des moyens et des compétences afin
de fouiller les Côtes et le plateau de Chanturgue. Mais rien n’est
advenu jusqu’à sa mort en 2005. Le directeur des recherches
officielles, Vincent Guichard, qui attend peut-être que Paul Eychart
soit enterré dans les mémoires, était chargé de le faire. Mais il ne
l’a jamais fait. « Il resterait à fouiller l’exigu plateau de Chanturgue »… a-t-il estimé. Un exigu plateau de 14 hectares, soit trois fois plus que La Roche-Blanche à Merdogne…
Gergovie-Les Côtes de Clermont, défendu par l'ASCOT, face au texte de César. |
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Voici l'ensemble du site des Côtes de Clermont et l'identification des collines en fonction du texte de César.
CORRESPONDANCE DU TEXTE ET DU SITE :
L'oppidum des Côtes de Clermont possède une superficie de 160 ha, plus de deux fois plus importante que celle de Merdogne.
UNE CHAÎNE DE COLLINES À DROITE
dont la hauteur décroît progressivement vers la plaine est nettement
visible. L'ensemble de ces collines, vu de Montferrand, peut apparaître
comme ayant la forme d'un joug.
La colline de Chanturgue est « ESCARPÉE DE TOUTES PARTS » . Elle est rattachée par son pied à l'oppidum . Elle est également « E REGIONE», c'est-à-dire dans l'axe du grand camp et de l'oppidum ,
si l'on situe le grand camp dans la plaine, à l'emplacement de
Montferrand (voir plus loin). La surface de son sommet est de 14
hectares, de quoi cantonner les légions de César. Mais surtout, DES STRUCTURES DE PIERRES sont décelables en cet endroit . C'est là la clef fondamentale qui permet d'identifier les Côtes de Clermont à Gergovie.
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Les
structures en pierre reconnues par Paul Eychart correspondent
totalement avec la morphologie du sommet du puy de Chanturgue. Les
autorités archéologiques n'ont encore jamais accepté de véritables
fouilles en cet endroit crucial. Monsieur Vincent GUICHARD, directeur
des recherches nommé par la Direction Régionale des Affaires
Culturelles d'Auvergne a même affirmé que le sommet de Chanturgue était
« exigu » alors que cet espace est trois fois plus grand que celui de
la Roche-Blanche, à Merdogne.
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Sur
l'oppidum des Côtes de Clermont, des structures en pierre sèche en pied
de falaise sont visibles, mais leur datation est très controversée. La
présence de remparts à l'époque de la guerre des Gaules n'est pas
prouvée. Mais elle n'est pas non plus définitivement écartée, ce qui
est le cas de Merdogne.
UNE TROISIÈME COLLINE
est visible de la première colline. Elle est bien située dans le
dispositif de l'ennemi, à gauche de l'axe grand-camp-petit
camp-oppidum. Un VASTE RAVIN la sépare de Chanturgue.
Le village de Montferrand, réaménagé à l'extrême fin du XIIe siècle selon un plan régulier, est exactement dans l'axe oppidum-petit camp-plaine.
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On
peut en outre rapprocher la forme de Montferrand de celle de la ville
médiévale de León, dont on sait qu'elle fut construite sur
l'emplacement du camp de la Legio VII. Son espace de 35 hectares peut
avoir contenu six légions. Le village est en outre visible des
collines. La ville de Florence, en Italie, fut elle aussi construite
sur un camp romain. |
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Plan du village de Montferrand. |
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En bleu, plan du camp de la VIIe Légion à León, Espagne. Le plan de la ville actuelle apparaît en grisé par-dessous. |
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Position du camp romain identifié à Florence, Italie. |
En dehors des cohérences avec le texte de César,
plusieurs points supplémentaires sont à relever :
1.
Les Côtes de Clermont dominent directement l'antique cité alors que le
site officiel de Gergovie-Merdogne se situe à plus à 6 km de la
capitale gallo-romaine
2.
Le site des Côtes de Clermont domine pleinement la grande vallée de la
Limagne, faisant de lui un lieu idéal pour la capitale arverne.
3. Sur le plateau, et à proximité du sommet, plusieurs sources alimentent l'oppidum.
BREF, TOUT INDIQUE QUE LE SITE DES CÔTES DE CLERMONT EST GERGOVIE.
La toponymie, clef d'un malentendu. |
Les recherches de Paul Eychart dans Préhistoire et origine de Clermont
(1967) et le recensement exhaustif de tous les textes anciens et de
toutes les hypothèses sur Gergovie, figurant dans la thèse d’Yves
Texier (1993), permettent de retrouver le site indépendamment de
l’analyse exhaustive de la bataille, et de comprendre l’erreur dont il
a fait l’objet.
Selon
Paul Eychart, Gergovie, capitale des Arvernes, ne se réduisait pas à
son oppidum mais était une vaste ville à la dimension du peuple le plus
puissant de la Gaule. Cela explique l’expression « César est entré
dans Gergovie » (Caesar Gergoviam pervenit) qu’emploie César alors qu’il n’a jamais pu parvenir à l’oppidum. Il était dans les quartiers bas de cette ville.
Comme
la plupart des capitales d’un peuple gaulois, Gergovie a été rebaptisée
du nom de ce peuple : Arvernia. La continuité entre Arvernia et
Clermont est établie. L’oppidum de Gergovie est naturellement devenu
« les Côtes de Clermont », tandis que la tradition orale et
écrite a toujours identifié Gergovie à Clermont.
Cependant,
à partir du X e siècle, alors que le nom n’est plus utilisé pour la
ville depuis longtemps, une "villa Gergoia" est citée, à 5 km au sud
est de Clermont, sur la route de Nîmes. Le mot Gergoia n’est autre que
Gergovia déformé, mais « villa » veut dire ferme et non
ville. On trouve aussi Gergoieta « la petite Gergovie »,dont
on ne sait si c’est le même lieu. Il n’est pas très étonnant qu’une
ferme sur la route de Gergovie ait pu être appelée ferme de
Gergovie : était-elle près d’une borne ? Beaucoup de villes
en France ont leur nom précédé de petit pour désigner un lieudit, un
relais, une auberge, etc. C’est au virage après cette ferme, en venant
de Nîmes, que l’on découvre au loin Clermont et les Cotes de Clermont.
Si
la ferme de Gergovie a pu tirer son nom de la capitale des Arvernes, il
faut qu’elle ait existé quand ce nom était en usage bien antérieurement
au Xe siècle. C’est bien le cas. On y a trouvé de nombreux objets du
néolithique au gallo-romain.
Au
XVIe siècle, l’érudit Simeoni recherche les lieux de la bataille, et en
premier l’oppidum, à partir du centre de Clermont. Ayant entendu parler
de la ferme de Gergovie, il part dans cette direction, opposée à celle
des Côtes de Clermont toutes proches. Il arrive à la ferme de Gergovie,
au pied du Puy de Merdogne, gravit cette montagne et y trouve des
restes antiques. Il ne lui en faut pas plus pour identifier le Puy de
Merdogne à l’oppidum de Gergovie. Toutes les explications sur Gergovie
données par Simeoni et ses successeurs ne seront que des élucubrations
à partir de cette affirmation, jusqu’à la « redécouverte » de
Gergovie au Côtes de Clermont en 1932.
La
puissance de la toponymie comme argument explicatif explique cette
erreur de quatre siècles, suivie de 70 ans de mensonge. La toponymie
est en effet l’argument premier de la localisation de tous les sites
anciens, la déformation des noms suivant des règles classiques et
établies selon les régions. Pour ne citer que les lieux mentionnés par
César, on a naturellement identifié Bibracte au Mont-Beuvray, Alésia à
Alise-Sainte-Reine, Uxellodunum au Puy-d’Issolud, etc.
Dans
le cas de Gergovie, l’erreur de toponymie provient du fait que Simeoni
a fait glisser le nom de Gergovie de la ferme vers la montagne proche, au lieu de lui faire suivre la route jusqu’à la montagne prochaine au
bout de cette route. Comme circonstance atténuante, il suivait cette
route dans la mauvaise direction en ayant laissé l’oppidum de Gergovie
derrière lui en partant de l’évêché de Clermont.
Toutefois, Siméoni aurait dû penser que le Puy de Merdogne ne peut en
aucun cas être l’oppidum de Gergovie : il a un nom gaulois
(Merdogne, dérivé de merda, le …bourbier!). Or un axiome de la
toponymie est qu’un lieu ne peut porter en même temps qu’un seul nom.
Seul un puy d’Auvergne ne portant pas un autre nom gaulois peut être
l’oppidum de Gergovie. Il n’y a que les Côtes de Clermont.
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